#22 - Seppuku de responsabilités
Attention, petit édito à tendance fortement politique dans 3.... 2.....1....
Cela ne vous a pas échappé: la France vit actuellement une période politique chargée et compliquée. Le RN est aux portes du gouvernement, et il n’y a plus que ces élections législatives susceptibles de faire bouger les choses pour empêcher que le pire arrive. A l’heure où j’écris ces lignes, le 30 juin n’est pas encore passé, et les résultats du premier tour n’ont pas encore été donné (edit du 30 juin au soir: 😐). Peut-être que ce bout de texte va très mal vieillir, mais ça n’empêche pas d’acter quelques faits importants.
Car la culture, le RN s’en bat les steaks. Ils l’ont bien fait comprendre à de multiples reprises, comme lorsque Marion Maréchal Le Pen assume le choix de supprimer le régime des intermittents du spectacle, ou l’idée de recentrer les achats du Pass Culture par un amendement proposé par le RN, parce que, vous comprenez, les mangas c’est pas top alors qu’il y a Baudelaire et Verlaine à côté. Je n’invente rien, c’est littéralement dit dans l’amendement. Un regard archaïque et arbitraire, basé comme trop souvent sur des points de vue d’un autre temps.
De ce fait, à part critiquer l’idée que l’intermittence, ça coûte de l’argent (ce qui n’est pas complètement vrai), on ne voit que très peu de traces de la culture dans le programme des partis politiques, sauf côté gauche, où on souhaite renforcer le budget public consacré à l’art, la culture et la création, ainsi que de défendre et améliorer le régime intermittents, tout en créant un nouveau régime pour les artistes auteurs. Fort heureusement, beaucoup de créateurs se sont soulevés pour pousser les gens à lutter contre l’extrême droite, notamment la tribune du Stream Populaire, diffusée sur Mediapart, afin de montrer le soutien des créateurs de contenus.
Les créateurs de jeu vidéo ont eux aussi montré leur soutien envers la gauche, se sentant menacés à juste titre par le retrait de certaines aides, notamment le CNC, qui soutient le jeu vidéo, mais aussi le cinéma et l’animation. C’est un des soutiens majeurs, sous la tutelle du ministre de la Culture, et la perspective qu’un ministre d’extrême droite arrive à la supervision du CNC peut être dramatique. De même que le crédit d’impôt du jeu vidéo (CIJV) qui permet de soutenir bon nombre de projets ou de studios, ou la privatisation de l’audiovisuel publique, qui sont comme France Télévisions, des soutiens très importants pour les projets de films ou de séries en tout genre.
Si certaines figures de la musique se mobilisent également, s’exposant à des violentes réactions sur les réseaux sociaux, c’est surtout le monde du cinéma qui surprend par son silence assourdissant. Alors même que le monde du cinéma français peut subir un contrecoup désastreux avec le RN au pouvoir, mis à part certaines exceptions, les artistes du milieu n’ont montré aucun soutien pour aucun parti politique de façon claire. Peur de se retrouver encore une fois sur le devant de la scène après les récents événements comme pour Depardieu ? Ou bien de subir le contrecoup d’un Canal qui contribue aux finances du cinéma mais détenu par Bolloré ? Probablement un mélange de tout ça, mais on aurait aimé un peu plus de courage à ce niveau/
Bref, si vous aimez la culture, si vous ne voulez pas que la liberté de création disparaisse, ou surtout si vous êtes un tant soi peu sensible à la situation de la France d’un point de vue économique ou sociale, vous avez les cartes en main au bureau de vote le 7 juillet.
[#film] - Hit Man
Dans les méandres des productions médiocres de films Netflix, on y distingue parfois quelques petites curiosités qui surnagent et qui méritent qu’on s’y intéresse. Celle-ci (pas dispo sur Netflix France, malheureusement - mais avec un petit VPN *wink wink*) nous vient de Richard Linklater, un réalisateur loin d’être manchot et surtout connu pour sa trilogie Before (Before Sunrise, Before Sunset, Before Midnight) où l’on suit à plusieurs moments de leurs vies deux personnages incarnés par Ethan Hawke et Julie Delpy. C’est aussi le réalisateur de Boyhood, le fameux film tourné sur une dizaine d’années et qui suit l’évolution d’un gamin sur toute son enfance. Mais Linklater est déjà un habitué de Netflix, avec qui il a déjà fait le chouette Apollo 10 1/2, utilisant la même technique d’animation en rotoscopie que l’un de ses films précédents, A Scanner Darkly. Il revient cette année pour Hit Man, changeant une nouvelle fois de registre et s’attaquant au film noir, mais en les mélangeant avec un peu de comédie et une touche de sexy, pour aller gentiment briser les codes des classiques du genre.
Garry est un professeur de philosophie en université assez introverti. Il a une vie bien rangée et solitaire, faisant son job le mieux du monde, plutôt satisfait de sa situation. Mais il donne aussi un coup de main à la police, les aidant à coffrer des gens souhaitant la mort de quelqu’un en engageant un tueur à gages. L’un des flics se fait alors passer pour ce tueur et cela permet d’arrêter ces personnes avant qu’ils puissent passer à l’acte. Un jour, Gary doit remplacer le flic jouant le rôle du tueur à gages, et s’invente un personnage: Ron. Ron est sexy, balèze, sûr de lui, et il s’avère extrêmement convaincant pour amener la victime à se confier à lui. Mais lorsqu’une jeune femme va faire la même demande, Gary va jouer avec ce rôle de tueur pour débuter une relation tout sauf simple.
Hit Man n’a sur le papier pas forcément de grands arguments pour convaincre, surtout que le film ne propose pas de réelles séquences marquantes ou de fulgurances de mises en scène. Là où il tire son épingle du jeu, c’est sur l’idée que l’on a du tueur à gages, et plus généralement de l’image du surhomme qui gère tout, anticipe tout. C’est l’idée même du film: ce mec badass n’est qu’une façade, et à aucun moment Gary ne développe des aptitudes particulières. Comme dans ce qu’il raconte dans ses cours de philosophie, il modifie son “moi”, étant persuadé qu’il peut le construire et le remodeler à sa guise, et que chacun est capable, à force de travail, de changer sa personnalité pour s’adapter à la personne qu’il faut convaincre. Et Linklater va se plonger dans cette idée pour venir briser les codes que l’on peut attendre, alternant les rôles, se jouant notamment de la fameuse demoiselle en détresse qui n’en est pas vraiment une.
Et qui de mieux que Glen Powell pour incarner ce prof/tueur à gages ? Peu connu du grand public, l’acteur commence petit à petit à se faire un nom, d’abord apparu dans Top Gun Maverick, puis dans une comédie romantique aux côtés de Sydney Sweeney. Il a tout du beau gosse, au sourire ultra bright, mais c’est surtout un super comédien, capable de jouer plusieurs rôles. Dans Hit Man, il forme avec Adria Arjona un couple très vite attachant et résolument sexy, qu’on a envie de suivre jusqu’au bout. Le personnage de Gary pense qu’il faut adapter son personnage à chaque personne qu’il rencontre. Cela va donner bon nombre de déguisement, d’accents, de postiches délectables, et surtout un jeu d’acteur fascinant et rafraîchissant pour Glen Powell. Il possède une vraie assurance, dans toutes les situations, ce qui permet à Linklater de venir facilement enlever toute morale au film, qui lorgne très vite vers un humour noir mais qui apparaît naturel. Personne n’est réellement gentil ou méchant, car tout le monde essaye de cacher sa vraie personnalité, son vrai “moi”. Le film est loin d’être parfait, mais il est surtout suffisamment intriguant et “pas comme les autres”, sans sombrer dans un esthétique arty qui pourrait rebuter, pour sortir du lot et marquer les esprits.
Hit Man / Réalisé par Richard Linklater / Avec Glen Powell, Adria Arjona, Austin Armello / Sortie le 7 juin 2024 sur Netflix US, en septembre 2024 sur Canal +
[#bd] - Ulysse & Cyrano
Lorsqu’on déambule dans les librairies, on est parfois accroché par une couverture, par l’objet, par l’aura qu’il dégage au sein d’un étalage. C’est complètement ce qui m’a intrigué dans ce Ulysse & Cyrano, avec néanmoins la présence de Xavier Dorison au scénario, qui avait déjà œuvré dans quelques pépites de la BD franco-belge, comme Long John Silver ou Prophet. Mais ici, on quitte l’aventure ou le fantastique pour se concentrer sur une fierté française dont on vante les mérites dans n’importe quel média culturel: la gastronomie.
On y suit les aventures de Ulysse Ducerf, un jeune lycéen dans une France d’après-guerre, qui est encore en train de se relever et de relancer l’économie. Ulysse est le fils d’un riche patron d’entreprise mais accusé d’avoir participé à l’effort de guerre allemand lors de l’Occupation. Sous la pression médiatique, Ulysse part avec sa mère se réfugier en Bourgogne, dans une petite auberge familiale, et fait la rencontre d’un homme discret, peu apprécié de la population alentours mais bon vivant: Cyrano. Celui-ci se révèle être un ancien grand chef cuisinier qui a choisi de vivre en solitaire suite à un drame qui a coupé court à sa carrière.
L’une des premières choses qui frappe dans Ulysse & Cyrano, c’est la beauté des planches. Stéphane Servain, excellent dessinateur qui a su capter le style de la bande dessinée en lui apportant une juste touche de stylisation dans les personnages, parvient sans mal à restituer une campagne française qui respire l’été à plein poumons. On sent un vrai travail de reconstitution sur la préparation des plats, et sur la passion qui anime Ulysse lorsqu’il commence à apprendre à cuisiner avec son nouveau mentor, bravant les interdictions de ses parents, qui l’oblige à travailler d’arrache-pied pour décrocher son Bac. Tout est très juste dans la narration, dans la façon de représenter le plaisir de la bonne bouffe, la froideur de ses parents, le choix cornélien qui se présente à Ulysse.
L’histoire en soi est somme tout classique, reposant avant tout sur la liberté pour quelqu’un de le laisser faire quelque chose qui le passionne, contre l’avis de ceux qui tentent de l’en empêcher. Tout le livre se concentre sur cette liberté créative qui nous habite, ici dans le domaine de la gastronomie. On pourrait regretter un propos déjà vu, mais le livre nous embarque avec tellement de légèreté et de sincérité qu’on finit par lâcher prise et se délecter de l’atmosphère réjouissante. Avec 176 pages au compteur, Ulysse & Cyrano est un gros morceau, bénéficiant d’un écrin sublime et d’un grand format adapté pour profiter du trait de Servain. Tout ça justifie un prix plus élevé que la normale, mais vu la taille du bébé, on profite à fond de ce petit plaisir crayonné.
Ulysse & Cyrano / Stéphane Servain, Xavier Dorison & Antoine Cristau / Editeur: Casterman / One-shot / 35 euros
[#jeu vidéo] - Senua’s Saga: Hellblade 2
En 2017, Hellblade: Senua’s Sacrifice sortait. On y dirigeait Senua en l’an 875, à l'ère des vikings. Suite à la mort de son mari Dillion, elle décide de se mettre en route vers le royaume de Hel pour ramener son âme, son crâne attaché à sa ceinture. Mais là où le jeu se distinguait, c’est par sa façon de traiter un sujet difficile: le trouble mental et les psychoses. Car Senua en souffre, mais à son époque, l’absence de connaissances fait que cette maladie est vue comme une malédiction. Malgré tout ça, elle est persuadée qu’aller dans le royaume des enfers ramènera son époux. Et le jeu misait énormément sur le travail de la comédienne, Melina Juergens, et de sa performance capture pour venir y apporter de la crédibilité, ainsi qu’un système audio binaural pour retranscrire fidèlement les voix qu’elle entend et jouer avec la spatialisation (un jeu à jouer de préférence au casque, donc). Une expérience particulière, développée avec l’aide de personnes souffrant de ces maux, et souhaitant aborder ce sujet à travers une épopée viking, qui aura marqué les joueurs.
Sept ans plus tard, Ninja Theory sort la suite de cette aventure, Senua’s Saga: Hellblade 2. Le studio a été racheté par Microsoft entretemps, et c’est devenu une exclusivité pour les consoles Xbox et PC. Dans l’histoire, Senua est capturée volontairement par des esclavagistes qui font route vers l’Islande afin de libérer son peuple, mais une tempête détruit leur bateau et elle se retrouve à voyager sur ces terres inconnues pour retrouver son peuple, mais aussi lutter contre de mystérieux géants qui ravagent la région. La recette est la même: Melina Jurgens reprend du service, accompagnée d’autres personnages, en poussant les curseurs de l’immersion encore plus loin. Le jeu ne possède toujours aucune interface mais toute l’aventure est géré via un grand plan séquence, refusant les coupes pour la mise en scène, afin d’immerger le joueur totalement.
Et on peut dire que Ninja Theory a profité de ses nombreuses années de développement pour appréhender les dernières versions de l’Unreal Engine. Le jeu est tout simplement splendide (les captures maisons qui parsèment le texte sont là pour le montrer), restituant les paysages nordiques âpres et rugueux avec une fidélité extrême, n’hésitant pas à alterner les différents types de biomes naturels avec un brio exemplaire. Les ambiances de lumières sont subtiles et magnifiques, bien aidés par des effets de post-production pour se rapprocher au mieux de l’imagerie cinématographique, influencés par le travail de Eggers sur The Northman par exemple. Un jeu de contraste saisissant, s’amusant à créer de la tension dans des lumières vives au cœur de la nuit ou dans l’obscurité silencieuse d’une caverne. Le jeu n’est pas très long (environ 6-7h) et promet un beau voyage. Mais c’est dans le reste que Hellblade 2 trouve un peu ses limites.
Car la force du premier volet était de jouer sur le doute qui habite le joueur quand aux véritables visions de Senua. Est-elle vraiment en route vers le royaume de Hel ? Est-ce que la dimension fantastique existe-t-elle vraiment ? Une vraie ambiguïté, qui allait parfaitement avec la thématique de la psychose, et qui assumait jusqu’au bout son parti pris. Dans la suite, cette ambiguïté n’existe plus vraiment. Les personnages autour d’elle la considère comme une élue, et les géants au centre des enjeux existent bel et bien. Alors on pourra arguer qu’en territoire inconnue, tout est possible, et que les croyances sont différentes, mais le jeu n’aborde finalement pas la chose de la même façon, préférant se concentrer sur le rôle de Senua dans sa manière de résoudre les conflits. Est-elle prête à succomber à ses démons et ses voix intérieures ? Sauf que ces thématiques arrivent très tard dans le jeu, et que tout le travail de sound design, sur les voix qui l’accompagnent et tentent de la résonner ou de la dissuader de continuer, est surtout là pour renforcer l’immersion plutôt que de parler du trouble mental.
On est plongé avec Senua et dans sa psyché, mais l’aventure en elle-même, faisant le choix de ne pas se préoccuper de ses troubles mentaux, de ne pas évoquer ça avec les autres personnages, devient nettement plus classique. Ce qui fait que les défauts du premier volet, ressortent plus, alors même qu’ils sont moins présents dans cette suite. On parle d’énigmes très légères qui pourraient tout aussi bien être absents (chercher des symboles dans le décor), et des combats accrocheurs dans leur mise en scène et leur violence, mais très simplistes dans le gameplay. Tout est une simple question de rythme, avec des phases parfois trop longues, et la frontière entre le gameplay et la cinématique est un peu trop fine pour justifier le gameplay à certains moments. Hellblade 2 reste une expérience à faire, rien que pour la singularité de la proposition, la richesse technique et le travail d’immersion. Mais il est plus faible dans ce qu’il raconte que le premier volet. Comme si les développeurs devaient justifier la technique pour créer ce qu’ils veulent faire sur ce second épisode: la Saga d’une héroïne islandaise comme on l’entend dans les récits. Une fusion entre les deux qui ne fonctionne pas autant que l’on voudrait, mais un jeu à faire malgré tout.
Senua’s Saga: Hellblade 2 / Développé par Ninja Theory / Sortie le 21 mai 2024 / Disponible sur Xbox Series X et PC / Prix: 50 euros
[#série] - Shôgun
Chez Disney +, il n’y a pas que les séries estampillés Marvel ou Disney, et fort heureusement. C’est ici que se niche les séries issus du groupe FX/Hulu, récemment dans le giron du géant américain, et cela permet de voir débarquer les pépites comme The Bear. Cette année, la chaîne FX s’est lancé dans une nouvelle adaptation du roman Shôgun de 1975, qui avait déjà eu droit à sa mini-série avec Toshiro Mifune et Richard Chamberlain. FX a mis les petits plats dans les grands, en commandant une série ambitieuse pour mieux restituer le contexte historique du roman.
L’histoire se déroule en l’an 1600, au moment où le souverain du Japon, le Taïko Nakamura Hidetoshi, est mort depuis un an mais a ordonné la création d’un conseil de régents pour gouverner le pays en attendant que son fils soit suffisamment grand pour lui succéder. La rivalité entre ces régents grandit, surtout entre Yoshi Toranaga qui s’occupe des relations internationales et Ishido Kazunari, en charge de gérer le château impérial d’Osaka. C’est à ce moment-là qu’un bateau néerlandais, l’Erasmus, s’échoue sur les côtes du Japon avec à son bord John Blackthorne, un pilote anglais. A cette époque, le Japon est sous influence religieuse et commerciale du Portugal, et l’un des régents, Toranaga, va se servir de l’arrivée de cet anglais, vu d’un mauvais œil par beaucoup de monde, pour accéder au pouvoir en tant que Shogun. Il s’aidera pour cela de Mariko, une japonaise qui a étudié auprès des jésuites et connaît leur langue, et se rapprochera de Blackthorne.
Si l’histoire de la série est purement fictive, le roman de Clavell s’inspire fortement de personnages réels, comme Nobunaga Oda, célèbre pour avoir été un des unificateurs du Japon à cette période, ou Williams Adams, un navigateur anglais populaire qui a réellement vécu au Japon. On est donc en face d’une histoire fictive prenant place dans un contexte historique proche du réel, et cela permet à la série de proposer une reconstitution assez incroyable, à la fois dans la manière de représenter les coutumes japonaises, mais aussi les décors et les costumes. On comprend assez vite pourquoi cela a pris plusieurs années à FX pour créer la série et pourquoi elle a coûté aussi chère. La série est aussi portée par un casting impeccable, à commencer par le charismatique Hiroyuki Sanada, déjà une superstar au Japon et qui s’est montré dans quelques productions occidentales (Sunshine, Speed Racer, Bullet Train, John Wick 4). Tout ce petit monde allié à un beau boulot de narration fait de Shôgun une oeuvre assez fascinante et très solide.
Et surtout, il ne tombe pas dans le piège du sauveur occidental, comme on pourrait le voir dans Le Dernier Samouraï par exemple. La série est là pour montrer le choc des cultures, de confronter les habitudes et les convictions de Blackthorne face à un peuple dont il ignore tout et dont il ne comprend pas la langue, malgré la présence de Mariko. Même si le personnage de Toranaga s’attache à lui, on comprend vite que ce n’est qu’un pion sur l’échiquier du pouvoir, afin de renverser les régents restants. La mise en scène arrive à bien saisir cette perte de repères, jusqu’à créer de belles séquences liées à la langue japonaise et la façon dont Blackthorne va la comprendre. L’honneur, le sacrifice, autant de préceptes inconnus pour l’anglais, qui va autant tenter de les faire résonner sur la vacuité de certains actes que de respecter les conséquences d’autres.
Pour autant, la série n’est pas parfaite. En dix épisodes, le récit souffre parfois d’un manque de tension dans les enjeux, peut-être trop transparents sur les intentions de certains protagonistes pour laisser à la série une touche de suspense. Elle fait le choix de se concentrer sur cette cohabitation entre deux cultures, avec le risque de perdre parfois la puissance de certains enjeux dont la résolution devient un peu trop évidente. Et d’un point de vue visuel, la surabondance de flous artistiques ou de fonds verts évidents cassent parfois l’immersion historique, mais on l’oublie assez vite. Il reste de Shôgun une oeuvre télévisuelle majeure de cette année. Le succès a été telle que FX et Disney sont partants pour d’autres saisons, alors même que cette saison 1 se termine là où le roman se clôture, il faudra donc imaginer la suite avec les scénaristes. On attend donc de voir où cela va mener.
Shôgun / Créée par Rachel Kondo & Justin Marks / Avec Hiroyuki Sanada, Cosmo Jarvis, Anna Sawai / Saison 1 (10 épisodes) / Dispo sur Disney +
Les films gratos du mois
Ce mois-ci: une très belle sélection côté France.TV, qui nous régale avec beaucoup de choix. Que ce soit dans l’animation en l’honneur du festival d’Annecy avec La tortue rouge ou Les hirondelles de Kaboul, du suspense chez De Palma avec Snake Eyes ou Mission to Mars, du sulfureux chez Verhoeven avec Showgirls ou Elle, du drame avec Wild ou encore des classiques comme Sixième sens, La vie aquatique et La couleur de l’argent, il y en a pour tous les goûts.
Les hirondelles de Kaboul (Zabou Breitman - 2019)
Nous, les chiens (Oh Sung-yoon - 2020)
La passion Van Gogh (DK Welchman - 2017)
La tortue rouge (Michael Dudok de Wit - 2016)
Le chat du rabbin (Joann Sfar - 2011)Sixième Sens (M Night Shyamalan - 2000)
Wild (Jean-Marc Vallée - 2014)
French Connection (William Friedkin - 1972)
Showgirls (Paul Verhoeven - 1996)
Elle (Paul Verhoeven - 2017)
En territoire ennemi (John Moore - 2002)
Raisons d’état (Robert de Niro - 2007)
Butch Cassidy et le Kid (George Roy Hill - 1970)
Brubaker (Stuart Rosenberg - 1981)
La vie aquatique (Wes Anderson - 2004)
Rushmore (Wes Anderson - 1998)
La couleur de l’argent (Martin Scorsese - 1986)
Ghost Dog ( Jim Jarmusch - 1999)
Snake Eyes (Brian de Palma - 1998)
Mission to Mars (Brian de Palma - 2000)
Playlist du mois
Ce mois-ci, mois assez chiche en terme de fulgurances musicales. Côté cinéma, Inside Out 2 nous régale les oreilles en reprenant les thèmes de Giacchino, mais n’est pas Michael qui veut, tandis que Guy Ritchie et son Ministry of Ungentlemanly Warfare n’aura pas du Permberton pour accompagner les esgourdes mais Chris Benstead se défend néanmoins.
Côté jeux vidéos, les nappes chill de Tavern Talk s’accompagne parfaitement pendant votre boulot, et les premières pistes de Assassin’s Creed Shadows avec The Flight aux commandes sont déjà prometteuses. Avec en prime le retour de Beyond Good and Evil pour les 20 ans.
Comme d’habitude, la playlist 2024 version Spotify s’étoffe tout au long de l’année, avec des morceaux des œuvres cités en rab pour les curieux.
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Playlist Youtube accessible en cliquant sur l’image
Misc
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