#28 - Dìdi Kong Racing
C'est la nouvelle année. Décollez ces paupières, prenez une petite aspirine, mettez-vous devant un petit téléfilm de Noël parce que pourquoi pas: l'année 2025 ne fait que commencer.
C’est une grosse année qui vient de passer. Difficile de passer outre la politique, entre notre très cher gouvernement qui est en totale roue libre, les Jeux Olympiques qui auront permis de rappeler que le sport peut avoir des bienfaits fédérateurs au-delà du possible ou encore le futur second mandat d’un Trump qui promet de belles choses.
Côté cinéma, ce fut une année en dents de scie. Le super-héros perd de la vitesse, avec un seul film chez Marvel (gros carton pour Deadpool and Wolverine) et plusieurs chez Sony qui a enchaîné bide sur bide (Madam Web, Venom 3 qui aura fait moins bien que ses prédécesseurs et Kraven le chasseur). L’arrivée du Superman chez DC censé relancer un nouvel univers et les Fantastic Four de Marvel Studios l’année prochaine seront déterminant pour savoir s’il y a encore un public pour ça ou s’il faut réduire drastiquement la voilure. En attendant, Dune Partie 2 aura largement convaincu le public, de même que certaines propositions plus radicales comme l’excellent The Substance de Coralie Fargeat, la première partie de la comédie musicale Wicked ou Civil War, pas un immense carton mais un film qui aura suscité beaucoup de débats.
Et l’année prochaine sera le retour de grands cinéastes, comme James Mangold et son Un parfait inconnu, mettant en scène un jeune Bob Dylan incarné par Timothée Chalamet, ou encore Mickey 17 de Bong Joon-Ho (Parasite) et ses clones de Robert Pattinson dans un délire SF qui a l’air jouissif. Chez les grosses licences, Mission Impossible: The Final Reckoning est chargé de clôturer l’ère Cruise, tandis que Jurassic World Rebirth veut quant à lui relancer la franchise, et 28 ans plus tard permettra de retrouver Danny Boyle sur un troisième épisode de sa franchise zombiesque qui promet. Enfin, le très attendu Avatar: Fire and Ash clôturera l’année.
Sur les séries de 2024 aussi on a eu droit à quelques pépites mais rien de transcendant. Shogun sort du lot dans les productions inédites, et Fallout et The Penguin auront créée leur petite surprise, tandis que les nouvelles saisons de The Bear, Arcane ou House of the Dragon auront marqué. Pour 2025, c’est la saison 2 de Severance qui attire tous les regards (depuis le temps qu’on l’attend), ainsi que la suite de l’adaptation de The Last of Us ou celle de Andor, probablement la meilleure série Star Wars en live action. Les nouveautés sont aussi présentes, avec la mystérieuse série Alien: Earth par le créateur de la série Fargo, Daredevil: Born Again qui est censé retrouver les intrigues de l’ancienne production Netflix pour l’incorporer dans le MCU mais aussi A Knight of the Seven Kingdoms, nouveau spin-off de l’univers de Game of Thrones, comme si on n’en n’avait pas déjà assez bouffé. De l’exploitation de licence en pagaille donc, et finalement peu de réelles nouveautés qui pourraient surprendre.
Côté jeu vidéo, on n’en n’a pas parlé dans ces lignes, mais Astro Bot fut résolument le GOTY de cette année 2024, parvenant à retrouver l’essence du jeu de plateformes 3D et arrivant même au niveau de grands jeux de Nintendo. Mais Final Fantasy VII Rebirth, le DLC d’Elden Ring ou encore Silent Hill 2 auront marqué l’année, de même que beaucoup de titres indépendants surprenant avec une volonté de se saisir de l’esthétique 3D Playstation comme Mouthwashing ou Dread Illusion.
Mais l’année 2025 n’est pas en reste. L’une des grosses attentes est sûrement l’arrivée de la mystérieuse Switch 2, que les rumeurs annoncent pour 2025, avec en point d’orgue le Metroid Prime 4 récemment annoncé. Assassin’s Creed Shadows, Monster Hunter Wilds, Split Fiction ou encore Avowed battront le pavé de ce début d’année, mais LE jeu qui est encore attendue pour 2025 sans plus de précisions, laissant tous les autres attendre une date précise pour se lancer, c’est bien sûr Grand Theft Auto VI, le mastodonte qui est déjà un carton assuré tant l’attente est énorme. Rockstar oblige, la communication est réduite à son minimum mais on peut déjà supposer qu’il faudra attendre 2026 pour le voir débarquer.
[#film] - Dìdi
Sean Wang, avant de faire son premier film, est d’abord un réalisateur taïwanais qui s’est fait la main sur plusieurs courts-métrages, dont l’un d’eux, Nǎi Nai & Wài Pó, est disponible sur Disney+. Il met en scène ses propres grands-mères, meilleures amies et colocataires. Le court prend le parti de laisser la caméra vagabonder entre ces deux personnages tandis que la vie suit son cours tranquillement. Ce court-métrage est un parfait représentant du style de Sean Wang, qu’il va continuer à distiller au sein de son premier long-métrage, Dìdi.
Été 2008. Chris Wang est un jeune américain d’origine taïwanaise qui profite de ses dernières semaines de vacances avec ses copains avant de rentrer au lycée. Sa grande sœur s’apprête à aller à l’université, le laissant seul avec sa mère et sa grand-mère, dont les relations ne sont pas au beau fixe. Ce sera une fin d’été ponctuée par la découverte de nouvelles choses pour Chris: un amour naissant, des amitiés qui s’effritent ou la volonté de se trouver une passion autre que faire des blagues vidéos avec ses amis.
Un pitch qui rappelle furieusement le Mid90s de Jonah Hill, dans lequel le réalisateur donnait la voix à un adolescent fan de skateboard dans les années 90. Mais le film baignait dans une espèce de spleen nostalgique, un plaisir régressif et tendre adressé au spectateur. Dans Dìdi, le film ne part pas dans un trop-plein nostalgique mais plutôt dans le portrait d’un adolescent des années 2000, cherchant sa propre identité mais sans vraiment user de la corde nostalgique. L’idée du film n’est pas de faire regretter aux adultes l’insouciance de leurs jeunes années mais plutôt de montrer comment certaines périodes charnières arrivent à faire grandir un personnage. Dìdi est là pour nous rappeler le passage de l’enfance à l’adolescence, lorsque nos vérités absolues se transforment en désillusions. Cette soeur qui se barre n’est peut-être pas aussi insupportable qu’on le pensait, ou ces potes avec qui on a passé toute notre enfance ne sont pas aussi fiables que prévu. On change, on évolue, on cherche inlassablement notre nouvelle passion qui déterminerait le reste de notre vie. C’est un âge où les repères s’entremêlent, où les amis et la famille changent notre perception et notre échelle de valeurs.
Et tout ceci, Sean Wang arrive à l’intégrer à son film avec un naturel merveilleux. Il récupère les codes du teen movie pour mieux les intégrer à ses propres souvenirs, cherchant à appuyer une certaine crédibilité sur les situations pour faire naître un comique de malaise infantile plutôt que d’aller chercher l’humour américain typique. Ce n’est pas dans les gags ou les situations que Dìdi arrache des sourires, mais principalement par le sentiment d’avoir “déjà vécu ça”, comme cette maladresse de Chris quand il comprend que les petits délires de ses jeunes années ne marcheront plus dans les années qui vont suivre.
Evidemment, l’autre point notable du film, c’est de placer l’histoire dans le contexte des années 2000. Que ce soit les chats par MSN avec ces notifications sonores reconnaissables ou la démocratisation des vidéos en lignes, Dìdi capte une époque où l’adolescence s’ouvre au monde. Sa crise d’identité passe par Internet, les tutos, les forums de discussions, et les tentatives de reproduire tout ce que l’on voit sur un écran dans la vie réelle. Le film rappelle par ricochet à quel point cette génération est influencée par toute la culture du net, qui débordera bien plus tard sur la vie réelle. Une éducation par écrans interposés, mais le film pose les bonnes questions sur ce que l’on respecte au sein de sa propre famille et sur l’importance des liens que l’on tisse. Un vrai beau film sur cette adolescence des années 2000, porté par un Izaac Wang au charisme évident: on a autant envie de lui coller des claques dans la figure que de le suivre dans ses frasques solaires. Dìdi est un beau “coming of age” étonnant et rafraîchissant, et on espère qu’il débarquera en France un jour.
Dìdi / Réalisé par Sean Wang / Avec Izaac Wang, Joan Chen, Shirley Chen / Sortie le 26 juillet 2024 aux US
[#jeu vidéo] - Indiana Jones et le Cercle Ancien
En 2021, Bethesda annonce en grandes pompes la sortie d’un nouveau jeu Indiana Jones basé sur un scénario original, et développé par MachineGames, déjà connu pour avoir travaillé sur les derniers jeux Wolfenstein, qui oscille entre l’excellent (les deux premiers épisodes) et le moins bon (Youngblood). Le jeu entre en développement de façon plutôt discrète, embauchant plusieurs personnes qui vont donner quelques indices sur l’orientation prise par le titre, notamment Jens Andersson, qui était le concepteur principal de Riddick: Escape from Butcher Bay, un FPS adapté de la licence et qui a une excellente réputation (à raison). Indiana Jones et le Cercle Ancien sort enfin en décembre 2024, et que dire sinon que c’est l’un des tout meilleurs jeux Indiana Jones sorti jusqu’à présent.
L’histoire du Cercle Ancien prend place peu après les événements du premier volet. Après avoir retrouvé l’Arche d’Alliance, Indiana s’est séparé de Marion et vaque à ses occupations de professeur au Marshall College. Une nuit, Indy surprend un individu de grande taille en train de dérober une statue de chat momifié récupéré il y a peu. L’homme s’enfuit mais laisse un pendentif appartenant à un ordre basé au Vatican. Indy part à sa poursuite et se retrouve embarqué dans une aventure qui va vite le dépasser, le mettant face à - sans surprises - des nazis.
Si ce Indiana Jones et le Cercle Ancien pouvait laisser planer un certain doute, c’était surtout pour son point de vue choisi: il s’agit d’un FPS. Peu surprenant de la part de MachineGames pour qui c’est son domaine de prédilection, mais jouer à un jeu Indiana Jones sans voir le personnage, c’est un choix plutôt singulier. Force est de constater que ce choix est payant, utilisant même le début du jeu comme une lettre d’intention pour justifier son choix. On y refait exactement toute l’intro du premier film, jouant avec la même mise en scène de Spielberg pour révéler le plus tard possible le visage de son héros. Ici, la vue FPS accentue l’effet, rend le protagoniste encore plus mystérieux avant de dévoiler la face d’Harrison Ford dans toute sa splendeur. La caméra passe derrière le personnage quand il s’agit de grimper des rambardes ou des échelles, et utilise à foison le jeu des ombres portées pour qu’on reconnaisse immédiatement la silhouette de l’aventurier, un pattern directement issu des films.
On sent que MachineGames possède un amour infini pour la licence, et cela se concrétise dans les choix de gameplay et de game design du jeu. Car si le titre vous emmène au Vatican via un premier niveau assez linéaire, c’est surtout pour vous apprendre les rudiments du corps à corps. Car Indiana Jones n’est pas Nathan Drake: ce n’est pas un aventurier qui mitraille des dizaines de gardes pour arriver à ses fins, il va plutôt jouer les roublards à grands coups de poings ou de déguisements. Et c’est la direction choisie ici: on privilégie l’infiltration en récupérant tout ce qui passe sous la main (marteau, balai, brosse à chiotte, poêle) pour assommer tous les nazis passant à portée. Le système de combat est complet: on peut bloquer, contrer, saisir, esquiver, et même utiliser son fidèle fouet pour désarmer son adversaire. Beaucoup d’options donc, dans des affrontements pas toujours très lisibles, mais suffisamment jouissifs pour ne pas rendre ça trop compliqué.
Une fois ces mécaniques intégrés, le jeu réserve une autre surprise. Arrivé au Vatican, Indy converse avec son allié du coin puis est lâché dans ce qui s’apparente à une grande carte ouverte. Un objectif principal est marqué sur sa carte, Indy est déguisé en prêtre mais le joueur est globalement libre d’aller où il veut, pour repérer les futurs indices de quêtes à faire ou repérer une fenêtre ouverte ou un passage de fortune par un balcon quelconque. Vous l’aurez compris, Indiana Jones et le Cercle Ancien quitte très vite sa structure linéaire pour afficher sa véritable ambition: l’exploration. Et ce, de manière très intuitive: le joueur observe, note dans le carnet et apprivoise son environnement au fur et à mesure. Evidemment, on aura droit à son lot de collectibles à récupérer, mais ce n’est jamais rébarbatif ou choquant dans un jeu qui vous met dans la peau d’un archéologue chargé de retrouvé des trésors perdus.
Et le jeu regorge de choses à faire, notamment via ses quêtes annexes très bien écrites, vous permettant d’aller dans un lieu inédit, de résoudre quelques petites énigmes et de fouiller un endroit abandonné depuis des centaines d’années. Car c’est là tout le sel de ce Indiana Jones: il réussit avec brio à créer l’idée qu’un monde fantastique gît sous nos pieds et n’attend que nous pour venir y déclencher ses pièges et portes dérobées. Que ce soit au Vatican ou dans les autres endroits traversés, on ressent parfaitement l’ambiance des films, on prend plaisir à résoudre ces énigmes avec l’aide de son carnet à la lueur d’une torche et voir ces grandes portes de pierre se mettre en branle parce qu’on aura été un minimum malin.
Et tout ceci sous le timbre si particulier de Richard Darbois, doubleur VF de Harrison Ford sur le troisième film. Si on dénote un timbre plus vieux qu’à l’accoutumé dû à l’âge du doubleur, difficile de résister au charme de cette voix qui accentue le plaisir de suivre les nombreuses cinématiques mettant en scène Indy. Et il est bien accompagné, notamment par Gina, second rôle féminin bien plus intéressant que dans les films, mais aussi par le grand méchant de cette aventure, Voss, officier nazi absolument délectable dans sa retenue et sa cruauté psychologique. Le jeu est magnifique sur sa forme, offrant des paysages somptueux mais il pêche un peu dans l’expression faciale de ses protagonistes. On y reconnait souvent les mimiques d’Indy mais la limite technique fait parfois quelques ratés, mais heureusement rien de bien méchant.
Difficile de résister à l’appel de l’aventure sur ce Indiana Jones et le Cercle Ancien. Au-delà de toute proportion proustienne qui joue beaucoup en sa faveur, MachineGames a surtout réussi à transcender l’esprit de la licence avec un jeu qui réunit tous les bons ingrédients sans jamais se compromettre. Action, exploration, énigmes, aventures: tout est magnifiquement intégré dans un game design rappelant Dishonored, voire même le précédent jeu des développeurs, Youngblood, qui introduisait lui aussi une certaine liberté de déplacement. Après un tel jeu, difficile d’imaginer un jeu Indiana Jones qui se jouerait autrement.
Indiana Jones et le Cercle Ancien / Développé par MachineGames / Sortie le 9 décembre 2024 / Disponible surPC/Xbox Series/Game Pass (sur PS5 au printemps 2025) / Prix: 70 euros
[#série] - Hippocrate
En 2014, Thomas Lilti sort le film qui va le faire connaître: Hippocrate. Mettant en scène Vincent Lacoste et Reda Kateb, il raconte l’arrivée d’un interne dans un service hospitalier et montre les conditions de travail de cet hôpital de manière bien plus réaliste que beaucoup de films sur le sujet. Le réalisateur a toujours voulu créer une série sur cet univers plutôt qu’un film, mais il a pu se lancer d’abord sur celui-ci pour se faire la main, avant que Canal+ lui donne le feu vert pour enfin construire sa série.
Le pitch de départ est plus ou moins le même, et met en scène trois internes inexpérimentés, Chloé, Alyson et Hugo (respectivement interprétés par Louise Bourgoin, Alice Belaïdi et Zacharie Chasseriaud), qui vont devoir faire face à une situation inédite: suite à des mesures sanitaires extrêmes, les titulaires du service de médecine interne de l’hôpital Poincaré se retrouvent confinés chez eux pendant 48 heures, et ce sera donc aux internes de tout gérer alors qu’ils ne se connaissent même pas. Ils seront aidés par Arben (Karim Leklou), un médecin faisant fonction d’interne.
Si Hippocrate se distingue nettement des séries médicales que l’on peut voir, c’est pour les mêmes raison que sur le long-métrage. La série aborde surtout les difficultés des hôpitaux à gérer les patients avec les moyens qu’ils ont. Une situation précaire qui va transformer chaque arrivée de patient en course contre-la-montre si jamais la place manque. Si la saison 1 pose une situation fictionnelle crédible, la saison 2 aborde les choses de façons plus concrète en mettant en avant les équipements vétustes des lieux, ce qui obligera les personnages à récupérer toujours plus de malades et à gérer le service des urgences, qui introduira le chef de service Olivier Brun (Boulli Lanners). Un véritable ajout-clé dans le casting, imposant un mentor pour beaucoup de personnages qui fera son possible pour équilibrer la sécurité de ses patients et rester dans les limites de ce que sa direction lui permet de faire.
Si le Covid aura un petit impact sur la fin de cette seconde saison, la troisième qui vient de terminer sa diffusion repoussera plus loin les thématiques du choix moral. On y voit des médecins prendre des décisions audacieuses et interdites alors que l’hôpital doit être géré en sous-effectif, seule solution pour ne pas sombrer dans des décisions froides et inhumaines. On pourrait y voir une volonté d’accentuer la situation désastreuse des hôpitaux en France, mais non: que ce soit les fermetures estivales et la réduction du personnel ou encore la gestion dramatique de certains EHPAD, Thomas Lilti fait simplement écho aux actualités. Dès lors, la série se transforme en une plongée anxiogène avec des personnages qui retiennent tout pour ne pas craquer, alternant le pragmatisme de certaines situations avec des revirements émotionnelles nécessaires afin de soutenir les patients les plus délicats.
Si Hippocrate se laisse aller dans quelques arcs narratifs un peu classiques ou romantiques, elle trouve son rythme de croisière sur la saison 2 et oublie de considérer ses personnages comme des héros. Ils n’ont pas la science infuse, font des erreurs, certaines coûtent chères, et ça permet à la série d’aborder les situations de façon très naturelle et très prenante. On y croit parce que l’on croit aux personnages, et le casting joue un gros rôle là-dedans. Louise Bourgoin incarne une Chloé qui passera par beaucoup d’étapes psychologiques pour trouver sa place, tandis que Karim Leklou possède une empathie naturelle qui va le placer en leader dans beaucoup de cas. Mention spéciale à Bouli Lanners qui incarne le chef de service Brun, véritable force de la nature mais possédant suffisamment de faiblesses pour le rendre terriblement humain. Trois saisons courtes pour une série que l’on espère voir continuer encore longtemps, ne serait-ce que pour maintenir cet état d’urgence envers les hôpitaux.
Hippocrate / Avec Louise Bourgoin, Alice Belaïdi, Karim Leklou, Zacharie Chasseriaud, Bouli Lanners, Geraldine Nakache / Trois saisons (22 épisodes) / Disponible sur Canal+
[#bd] - Deux filles nues
Après les événements de Charlie Hebdo, l’auteur-dessinateur Luz quitte la rédaction peu de temps après pour se consacrer uniquement à une carrière de dessinateur à travers la bande dessinée. Il se lancer dans plusieurs projets pour parler de sujets divers et importants sur la liberté de parole et la difficulté de se relever après un événement aussi traumatisant, chose qu’il régurgitera dans la BD Catharsis. Après plusieurs petits succès dont Testosterror, Luz revient avec une BD qui aura clairement marqué cette année 2024: Deux filles nues.
Otto Mueller est un peintre allemand qui a vécu principalement durant le début des années 1900 et notamment lors de la montée du nazisme en Allemagne. Il possède sa petite réputation mais il n’a pas l’aura de grands peintres de l’époque comme Dix ou Picasso, préférant l’impressionnisme au style plus académique. En 1919, il peint le tableau Deux filles nues à l’aide de Maschka, sa femme et sa muse qui pose pour lui sur de nombreux tableaux. La BD débute ses premières cases d’un blanc immaculé, simplement perturbé par quelques bulles de dialogues venues du néant. Puis le dessin commence à apparaître, à coups de brosses, afin de distinguer le visage d’un peintre regardant intensément vers nous, un pinceau à la main. On comprend alors ce qu’il se passe: la BD va prendre le point de vue du tableau lui-même, comme une fenêtre sur ce qu’il observe, un témoin du monde qui l’entoure.
Le sujet et le contexte ne laisse que très peu de doutes: Deux filles nues va aborder toute cette période compliquée en Allemagne, où le nazisme prend de plus en plus d’envergure, avec une volonté de détruire ou de démontrer que la pluralité de l’art n’a plus sa place dans un pays qui impose sa vision unique et bridée. Si l’artiste ne respecte pas la “perfection” selon les convictions nazies, il devient un attardé mental. Le tableau passant des mains de l’artiste jusqu’à la galerie d’un collectionneur juif, on y observe une vie de famille au premier plan tandis que l’extérieur d’une fenêtre ne laisse rien présager de bon envers la suite des événements. L’inconscient collectif fait le reste et le lecteur sait très bien ce qu’il va arriver. Luz a poussé son enquête autour de ce tableau afin de retracer tout son parcours passionnant, de sa conception jusqu’à sa récupération plusieurs décennies plus tard afin de sauver cette œuvre importante. On y évoque même cette fameuse exposition “L’art dégénérée” à Munich en 1937, censé défendre l’interdiction de ces œuvres d’artistes blocheviks et juifs et sélectionnées par le peintre Adolf Ziegler, dans les bonnes mœurs de Hitler à l’époque. Une véritable reconstitution minutieuse qui force le respect.
Et évidemment, le point de vue du tableau rajoute encore plus à cette défense de l’art en général. Comme un survivant qui n’a aucun moyen de se défendre, Deux filles nues nous plonge dans les coulisses de ce moment de l’Histoire qu’il ne faut pas oublier, surtout dans le contexte actuel où l’art en général doit pouvoir être respecté, montré et ne pas être oublié. Luz y met toute son âme, joue avec du lavis et des teintes sépias afin de représenter au mieux cette époque trouble, avec des idées de découpages brillantes pour garder ce point de vue jusqu’au bout. On ressort de la lecture éprouvé et enrichi, on pense quelque part au Musée de Chabouté dans l’idée que les œuvres aient leur vie propre mais Deux filles nues est surtout un pamphlet pour la liberté d’expression à tous les niveaux, et l’importance de faire survivre les œuvres quoi qu’il arrive. Une petite pépite.
Deux filles nues / Luz / Albin Michel / One Shot / 25 euros
Les films/séries gratos du mois
Ce mois-ci : on reste encore un peu dans la période de Noël avec Le Secret de la pyramide ou les aventures du jeune Sherlock Holmes, et quelques films de Jacques Demy sur Arte qui mettra en scène une jeune Catherine Deneuve. Ne loupez pas Tar de Todd Fields, film récent qui met en scène une Cate Blanchett en chef d’orchestre impitoyable. Chez TF1 et M6, on a encore droit à deux films récents pour les enfants, dont un excellent avec Le Chat Potté 2, et deux sagas qui se tirent la bourre, Taken et Rocky.
Le secret de la pyramide (Barry Levinson - 1985)
Tar (Todd Field - 2022 - dispo jusqu’au 19 janvier)
Royal Affair (Nicolaj Arcel - 2012)
Maestro(s) (Bruno Chiche - 2022)
Le droit de tuer (Joel Schumacher - 1996)
Certains l’aiment chaud (Billy Wilder - 1959)
Les parapluies de Cherboug (Jacques Demy - 1964)
Peau d’âne (Jacques Demy - 1970)
Les demoiselles de Rochefort (Jacques Demy - 1967)Le chat potté 2: La dernière quête (Joel Crawford & Januel Mercado - 2022)
La ligne verte (Frank Darabont - 1999)
Sonic 2 le film (Jeff Fowler - 2022)
Taken la saga (Pierre Morel - 2008)
Arrête-moi si tu peux (Steven Spielberg - 2002)
Rocky la saga (Sylvester Stallone - 1976)
Playlist du mois
Ce mois-ci, une sélection portée par la comédie musicale Wicked qui a fonctionné sur moi à mon grand étonnement, autant pour les chansons que pour son score géré par John Powell et Stephen Schwartz. Sinon, la soundtrack de Nosferatu saura faire plaisir à tous les amateurs d’ambiance sombre. Côté jeux vidéos, Gordy Haab fait un super boulot pour reprendre l’ambiances des Indiana Jones sur le Cercle Ancien, sans forcément parvenir à trouver de nouveaux thèmes marquants, et Slitterhead, titre d’horreur sorti discrètement, marque les esprits par le retour d’Akira Yamaoka et livrant de belles plages dissonantes qui rappellent les grandes heures de Silent Hill.
La playlist 2024 version Spotify est donc complète avec une grande sélection d’œuvres sorties cette année et 230 morceaux au compteur.
» Accéder à la playlist Spotify de 2024
Playlist Youtube accessible en cliquant sur l’image
Misc
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Robert Eggers (The Northman, The Lighthouse, Nosferatu) est dans le Video Club de Konbini