Les fêtes de Noël approchent, et il faut bien trouver un petit cadeau à offrir pour votre neveu, votre tante ou votre boulanger (si jamais vous êtes très proche). Difficile de dénicher la perle rare devant cet océan de bulles et de cases en tout genre, surtout quand il faut faire plaisir à quelqu’un d’autre. Et donc, de la même façon que le petit numéro bonus pour les lectures de cet été, voici un “petit” guide de recommandations dessinées.
Cette fois-ci, on va brasser plus large, plus fort (plus long), et on va regrouper tout ça en plusieurs catégories pour mieux cibler vos cadeaux et votre destinataire. Que ce soit la petite BD one shot sans conséquence ou le premier tome d’une série s’étalant sur une dizaine de tomes, il y en aura pour tous les goûts.
Catégorie “Juste un, prix doux”
Dans cette catégorie se situent les BDs “one shot”, celles où toute l’histoire en un seul volume, sans laisser de portes ouvertes ou la mention “à suivre”. Pas de remarques du genre “ah, tu m’obliges à acheter la suite si c’est bien” ou “pas de place dans ma bibli pour le reste de la série”. Une histoire auto-contenue, la vision de l’artiste dans son intégralité et la promesse d’avoir une belle édition unique dans un format différent du livre d’à-côté.
Rappel des œuvres déjà chroniquées par ici:
It’s Lonely at the Centre of the Earth (Zoe Thorogood / HiComics / 28 euros): une histoire autobiographique qui parle de la dépression de l’artiste et de ses angoisses. C’est souvent brillant et passionnant, mais à conseiller à ceux qui n’ont pas peur des bad mood.
Au-dedans (Will McPhail / 404 Comics / 26,50 euros): aussi une histoire autobiographie, avec une certaine légèreté et un second degré qui arrive autant à faire rire qu’émouvoir. Une pépite.
Catwoman: Lonely City (Cliff Chiang / Urban Comics / 21 euros): une Selina Kyle vieillissante revient à Gotham après des années de taule et part faire un dernier braquage. C’est joliment illustré et aucunement besoin de connaître à fond Batman pour apprécier.
Look Back/Goodbye Eri (Tatsuki Fujimoto / Crunchyroll / 7,30 euros): deux one shots émouvants et sensibles sur la création visuelle et la passion liée à ça. Goodbye Eri poursuite le travail de l’auteur sur la création visuelle, et les deux livres forment un chouette diptyque.
La Route (Manu Larcenet / Dargaud / 30 euros): incontournable de l’année, adaptation du roman de McCarthy par Larcenet, une promesse visuelle folle avec une ambiance de fin du monde sans pitié. On est loin d’un Astérix niveau ambiance, mais c’est de la qualité.
Ulysse & Cyrano (Stéphane Servain, Xavier Dorison & Antoine Cristau / Casterman / 35 euros): parfait pour compenser la morosité ambiante. Une vraie belle histoire d’amitié autour de la cuisine et des dessins qui sentent le romarin et le bon vin.
[#comics] - Mobilis - Ma vie avec le capitaine Nemo
La petite Anora est seule dans une capsule de stase au milieu de l’océan. Elle est alors récupérée par un gigantesque sous-marin dont le nom n’est pas inconnu: le Nautilus. A son bord, le capitaine Nemo est le seul survivant de son équipage à l’exception d’un robot majordome, et ces années de solitude l’ont rendu aigri et passablement désagréable. Mais la présence de la jeune fille va faire ressortir des émotions qu’il croyait enfouies, malgré la mission qu’il s’est juré de porter à son terme et qui l’éloigne de l’affection qu’il a pour Anora.
Si Mobilis est catalogué comme un album jeunesse - qui passe effectivement très bien pour les enfants - il possède une lecture à plusieurs niveaux dans son message et ses thématiques. Il y a de l’aventure dans ce livre, et beaucoup d’émotions. Mais c’est aussi une histoire portée par Juni Ba, un auteur français qui travaille beaucoup pour les Etats-Unis, et qui a une patte graphique reconnaissable entre milles. Son coup de crayon dynamique permet un mélange de plusieurs styles, dans des couleurs cartoons mais avec une expressivité superbe. Il confirme que c’est un auteur à suivre de très près, et DC Comics l’a bien compris en lui confiant une histoire autour de Robin qui arrivera l’année prochaine.
Mobilis - Ma vie avec le capitaine Nemo / Juni Ba / Bayard / 18 euros
[#bd] - Mécanique Céleste
Dans un monde post-apocalyptique - oui encore un - un groupe de survivants parvient à s’auto-gérer grâce à quelques exploitations agricoles de fortune formant la cité de Pan, et la jeune Aster en fait partie, avec son ami Wallis. Un jour, des envoyés de la grande cité militaire de Fortuna arrivent pour exiger le rattachement de Pan à leur empire. Pour éviter de se retrouver avec un tribut à verser et une survie encore plus précaire, les habitants décident de jouer le jeu en acceptant un tournoi de Mécanique Céleste qui s’avère être… de la balle au prisonnier.
Véritable petite surprise à sa sortie en 2019, Mécanique Céleste est l’œuvre de Merwan qui avait déjà prouvé son talent graphique sur Fausse Garde. Ici, le fameux sport est un prétexte pour offrir des affrontements dynamiques et percutants, jouant sur de l’action surprenante et acrobatique où tout peut arriver. C’est prenant de bout en bout et permet d’avoir des planches assez fantastiques. Oubliez par contre sa suite sortie quelques années plus tard: le premier volet n’appelait pas à une séquelle et ce volume 2 est beaucoup moins intéressant que celui-ci.
Mécanique Céleste / Merwan / Dargaud / 27 euros
[#comics] - Kroma
Au beau milieu d’une forêt aux couleurs éclatantes se trouve une ville aux teintes pâles, tout comme ses habitants. Les monstres en dehors réagissent à la couleur, et les habitants n’ont pas d’autre choix que de rester entre ces murs monochromes. Mais dans la grande tour de la ville est enfermée une jeune fille, Kroma, possédant des yeux vairons et représentant le mal absolu qui ronge ce monde, selon ces habitants. Mais un jeune garçon va devenir de plus en plus curieux et s’intéresser à cette personne étrange.
Lorenzo de Felici n’est pas un inconnu sur cette newsletter, car c’est déjà l’artiste qui s’occupe avec Robert Kirkman de Void Rivals. Mais pour ce Kroma, il décide de se lancer en solo dans une histoire originale, profitant de cet univers pour jouer énormément sur les changements de teintes et l’attrait de la couleur. Et autant dire que pour un premier essai, c’est fichtrement réussi. En quelques chapitres à peine, De Felici dit tout d’une société repliée sur elle-même à cause d’une religion menée par la peur de l’inconnu et de la couleur. Une vraie pépite qui mérite toute son attention.
Kroma / Lorenzo de Felici / Delcourt / 24 euros
[#manga] - Bibliomania
Une jeune fille nommé Alice se réveille dans une mystérieuse pièce chiffrée 431. Un personnage étrange ressemblant à un serpent l’accueille et lui révèle que pour sortir vers le monde extérieur, Alice devra remonter chaque porte une à une pour aller jusqu’à la chambre 000, la dernière avant la sortie. Mais chaque chambre a un prix à payer, qui va petit à petit détruire son âme si elle s’enfonce trop profondément.
Sorti l’année dernière, ce manga one shot est l’œuvre de deux artistes, Orval au scénario et Macchiro aux dessins. Il s’agit somme toute de leur première histoire, et quelle histoire. Sans trop en dévoiler, Bibliomania prend son origine dans le roman d’Alice au pays des merveilles, mais le manga va vite opérer un virage à 180 degrés qui surprendra par son atmosphère sombre et sans détour. C’est somptueux sur les dessins, proposant des pages magnifiques qu’on aimerait voir en grand format, mais l’écrin en forme de livre maléfique est déjà un bel objet à avoir dans sa bibliothèque.
Bibliomania / Orval & Macchiro / Mangetsu / 23 euros
[#bd] - Nos mondes perdus
En 1993, la jeune Marion Montaigne est ébahi devant le film du moment: Jurassic Park. Une véritable fascination qui va se transformer en obsession envers la paléontologie, les fossiles et toute l’existence humaine. Bien connu pour ces livres “Tu mourras moins bête”, Montaigne s’attaque cette fois-ci à la découverte de la vie sur Terre avant l’apparition de l’homme en tentant d’énumérer la façon dont les scientifiques ont réussi à décortiquer ce passé lointain.
C’est comme d’habitude passionnant à lire, peut-être plus décousu que ces ouvrages précédents, alternant des questionnements autour de sa propre vie avec une chronologie des hommes et femmes qui ont œuvré pour comprendre les dinosaures et réussir à les identifier. Mais tout est fait avec un humour ravageur et bon enfant, sans jamais enlever une assise scientifique certaine.
Nos mondes perdus / Marion Montaigne / Dargaud / 25,50 euros
[#bd] - Happy Endings
Trois histoires. Dans l’une, on suit des agents du futur envoyés dans notre époque sur une petite ville balnéaire mais n’ont plus trop envie de repartir dans leur période. Dans une autre, un jardinier de cimetière se balade à travers les tombes et tombe sur un pleureur professionnel dont il tombe amoureux. Et dans la dernière, pendant la nuit du Nouvel An, une étudiante en art passe la soirée avec un ami et lui demande de poser nu pour faire son portrait.
Lucie Bryon a déjà prouvé un certain talent pour ces histoires du quotidien avec une touche de fantaisie et d’amour, notamment dans le très très cool Voleuse, et elle réunit ici trois histoires anthologiques sur trois duos de personnages dans des contextes radicalement différents. On sent l’évolution du trait de l’artiste, les histoires étant dessinés à plusieurs époques, mais le trait qui évoque des mangakas plus “slice of life” comme Keigo Shinzo appâte immédiatement notre petit cœur pour ne plus le lâcher.
Happy Endings / Lucie Bryon / Sarbacane / 24 euros
[#manga] - Her - Portraits de femmes
Ide est une femme qui veut plaire aux hommes mais son caractère a tendance à les effrayer. Par son côté affirmé et sans concession, elle se demande s’il faut changer pour arriver à plaire, tandis que la lycéenne Nishitsuru se questionne énormément sur le monde autour d’elle et ce qu’elle doit faire pour rester dans la norme, tandis qu’elle rencontre sa voisine lesbienne qui assume complètement son âge avancée et ses liaisons multiples.
Her est une anthologie réunissant plusieurs histories qui se déroule dans le même microcosme et mettant en scène plusieurs personnages féminins qui se croisent sans le savoir. C’est surtout l’œuvre de Tomoko Yamashita, une autrice qui est devenue très importante dans le monde du manga, notamment grâce à l’excellente série Entre les lignes. Dans ce one-shot, elle pose son point de vue sur la femme dans un monde contemporain, jouant à fond l’introspection avec une subtilité et un réalisme dans l’écriture qui sonnent juste. Une vraie belle porte d’entrée dans l’univers de la mangaka, prouvant que le manga arrive à sortir des clichés qu’on lui impose trop souvent.
Her - Portraits de femmes / Tomoko Yamashita / Naban Editions / 8 euros
Catégorie “Et c’est pas fini”
On rentre dans une catégorie de recommandations moins “économique” et surtout plus incertaine. Offrir un premier tome est toujours un peu risqué, surtout si cette entrée en matière est pas suffisamment intrigante pour donner envie de poursuivre l’aventure, mais c’est surtout des séries qui ne sont pas actuellement terminée. D’un certain côté, ça permet aussi d’avoir un peu d’attente pour que le destinataire de votre cadeau achète la suite, mais il ou elle lui faudra un peu de place dans sa bibliothèque.
Rappel des œuvres déjà chroniquées par ici:
Hirayasumi (Keigo Shinzo/Le Lézard Noir/15 euros par tome): on y suit un trentenaire japonais qui accueille sa cousine d’une école d’art, et c’est probablement la BD tranche de vie la plus chouette sur le marché (6 tomes)
Energon Universe (Kirkman/Urban Comics/20 euros par tome): l’auteur de Walking Dead s’est lancé dans un univers partagé réunissant les Transformers et GI Joe. Série inédite (Void Rivals) et one shot en pagaille, l’univers a l’avantage d’avoir plusieurs points d’entrées (6 tomes)
Fool Night (Kasumi Yasuda/Glénat/8 euros par tome): un univers sans soleil où les humains choisissent de se transformer en plante pour faire survivre le monde. Et c’est toujours aussi chouette et étonnant dans le dessin (8 tomes)
Dandadan (Yukinobu Tatsu/Crunchyroll/7.30 euros par tome): deux lycéens, des aliens, des démons et un manga incroyablement fun, superbement gratté et qui part dans toutes les directions. En plus l’anime cartonne sur Netflix (13 tomes)
Ao Ashi (Yugo Kobayashi/Mangetsu/7.20 euros par tome): Aoi Ashito est un jeune garçon passionné de foot et intégrant une école prestigieuse pour y disputer des matchs d’anthologie. Toujours aussi prenant, jouant la carte du réalisme et de la stratégie plutôt que de l’épique (24 tomes)
[#manga] - Radiant
Dans un univers d’héroïc-fantasy se trouvent des créatures, les Nemesis, qui tombent du ciel et provoquent chez ceux qui les touchent des infections, en tout cas pour les chanceux qui survivent. Ils sont rejetés par la société mais se découvrent des pouvoirs suite à ces contacts et deviennent des sorciers afin de lutter contre ces créatures et ramener une paix entre les infectés et le reste de la population. Seth fait partie de l’un d’entre eux et il va partir à la recherche de la source des Nemesis appelée le Radiant.
Difficile de conseiller un shonen comme One Piece qui a déjà plus de cent tomes au compteur. Mais Radiant est une singularité dans l’univers du manga shonen, puisqu’il est écrit et dessiné par un français, Tony Valente. Il est d’ailleurs un des rares à être publié au Japon et même à avoir eu son adaptation en anime, c’est pour dire le succès de ce manga qui le mérite bien. Car Radiant n’a absolument pas à rougir face aux cadors du genre: déployant son univers et ses personnages à travers un fil rouge passionnant, c’est sur le dessin que Valente impressionne, arrivant à imposer son propre style tout en épousant complètement les codes du manga avec un immense talent. Et tout ça, en parvenant à distiller des messages sociaux modernes sur le rejet et la discrimination.
Radiant / Tony Valente / Ankama Editions / 8 euros / 19 tomes en cours
[#comics] - Les affamés du crépuscule
Dans un monde au bord de l’extinction, les humains et les orcs ont fait une trêve afin de vivre chacun de leur côté et ainsi protéger leur peuple respectif pour ne pas disparaître. Mais un ennemi commun va commencer à décimer leurs villages: les Vangols. Une petite troupe de mercenaires humains, aidée par la fille d’un clan orc, va tenter de découvrir l’origine de ces créatures et comment en venir à bout avant que les deux camps soient exterminés.
Porté par Gwendolyn Willow Wilson au scénario et Chris Wildgoose aux dessins, Les affamés du crépuscule ne brille pas par l’originalité de son univers, mais plutôt dans la façon dont il dépeint le quotidien de ces figures connues de l’héroïc-fantasy. Chacun a ses qualités et ses défauts, voulant simplement le bien-être de son peuple, quitte à s’accorder avec son ancien ennemi pour trouver la paix. Il y a un aspect très Game of Thrones dans la façon de gérer les différents arcs narratifs tout en montrant les conflits internes et les complots qui se trament dans l’ombre alors que l’ennemi est à leurs portes. Le premier tome fait office de grande introduction, mais régale par un dessin vraiment soigné et une intrigue dont on a envie de découvrir la suite.
Les affamés du crépuscule / Gwendolyn Willow Wilson & Chris Wildgoose / Delcourt / 24 euros / 1 tome en cours
[#comics] - Kaya
Après que son village ait été détruit, Kaya a été chargée d’une mission: conduire son jeune frère Jin en sécurité pour accomplir une prophétie et mettre à mal l’empire robotique qui a détruit leur vie. Sur la route, les deux enfants vont faire la rencontre de peuples plus ou moins agressifs avec eux, tandis que d’autres seront là pour les épauler et lutter contre les machines. Mais la grande sœur va devoir faire confiance en Jin et se rendre compte que le jeune garçon a un destin bien plus grand qu’il ne le pense.
Premier titre en solo de l’artiste Wes Craig, qui avait déjà opéré aux dessins sur Deadly Class, il part cette fois-ci sur une histoire de quête initiatique somme toute classique dans sa démarche, jouant l’aspect road trip entre une jeune adolescente badass armée d’un bras métallique et un jeune frère qu’il faut protéger et qui cherche son indépendance. Petit à petit, l’histoire plante ses ambitions et l’auteur devient de plus en plus à l’aise avec ce qu’il veut raconter, sublimant les pages avec ses couleurs magnifiques et son trait expressif et dynamique.
Kaya / Wes Craig / Urban Comics / 17 euros / 2 tomes en cours
[#bd] - Bolchoi Arena
Dans un futur proche, les mondes virtuels ont largement évolué, jusqu’à devenir des divertissements au réalisme saisissant, notamment via le principal réseau mondial virtuel: le Bolchoi. Dans cet univers qui copie le nôtre, chacun possède son propre avatar et l’exploration spatiale a repris son cours, permettant à chacun d’aller toujours plus loin dans l’espace et de développer des technologies toujours plus poussées. Marje s’apprête à y faire ses premiers pas avec son amie Dana.
Scénarisé par Boulet et dessiné par Aseyn, les dessins de Bolchoi Arena ne laisse aucune doute quant à l’influence de l’artiste: on est sur un style qui rappelle les grandes heures du manga des années 90, où Otomo et son Akira imposa son style artistique qui va influencer beaucoup d’autres comme Hiroki Endo et son Eden. Aseyn rajoute des touches de couleurs et ses propres influences européennes, bien aidé par l’écriture de Boulet et sa passion pour l’espace, et proposent ensemble avec Bolchoi Arena une vraie aventure SF et passionnante. Si la série n’est pas terminée, elle est déjà annoncé pour se terminer avec le cinquième volume (le quatrième sortant l’année prochaine).
Bolchoi Arena / Boulet & Aseyn / Delcourt / 24.50 euros / 3 tomes en cours
[#comics] - Wonder Woman: Hors-la-loi
Dans un bar aux Etats-Unis, une bagarre tourne mal et une Amazone est accusée d’avoir tué plusieurs clients avant de s’enfuir. Le Congrès américain va alors promulguer une loi pour que les habitantes de Themyscira, l’île des Amazones, ne puissent plus fouler le sol américain sous peine de se voir expulser, voire pire. Une section spéciale est alors envoyée à travers le pays pour rechercher et arrêter toutes celles qui refusent de quitter le territoire. Wonder Woman devient une fugitive et va commencer à mener son enquête pour découvrir qui se cache derrière cette machination.
Voici un peu de super-héros dans cette sélection avec une série régulière mais écrite par Tom King (Mister Miracle, Supergirl: Woman of Tomorrow). Connu pour mettre en place des histoires aux thématiques ouvertement politiques, celle-ci ne fait pas exception, malgré un propos sur le patriarcat pas toujours des plus subtiles. Mais avec l’aide de Daniel Sampere aux merveilleux dessins, King arrive à rendre l’image de Wonder Woman plus iconique que jamais, délaissant souvent la violence au profit des convictions qu’elle renvoie. Et même si le jeu de temporalité déstabilise au début (l’histoire est narrée par un personnage dans le futur), cela reste une valeur sûre et une bonne porte d’entrée.
Wonder Woman: Hors-la-loi / Tom King & Daniel Sampere / Urban Comics / 22 euros / 2 tomes en cours
[#bd] - Le château des animaux
En France, une ferme a été reconvertie en château mais les hommes l’ont abandonné. Repris par les animaux restants, ce château s’est développé comme une société dirigée par Silvio, un taureau qui a pris le contrôle de l’endroit et force les animaux plus faibles à travailler pour lui. Miss Bengalore, une chatte mère de deux petits, essaye de garder la tête haute et de survivre mais à cause de plusieurs injustices, elle va commencer à monter une petite rébellion menée non pas par la violence mais par la désobéissance.
Cela fait quelques années que Xavier Dorison et Félix Delep mène la barque de cette petite série qui devrait se conclure l’année prochaine avec le quatrième et dernier volume. La BD est d’abord publiée dans des grands journaux en plusieurs parties, permettant de profiter des planches en très grand format et agrémentée de bonus. On pense évidemment à La ferme des animaux d’Orwell dans les thématiques, et on est pas loin. Les dessins très beaux et expressifs de Delep, rappelant Blacksad par moment sans le côté anthropomorphe, régalent les yeux et le scénario de Dorison transforme une aventure animale en un pamphlet contre les dictatures.
Le château des animaux / Xavier Dorison & Félix Delep / Casterman / 16 euros / 3 tomes en cours
Catégorie “J’ai dépensé sans compter”
Cette troisième et dernière catégorie est celle de toutes les dépenses. On reste sur des séries en plusieurs volumes, mais cette fois-ci il y a l’assurance que les auteurs sont arrivés au terme de leur histoire. Offrir le premier tome peut donc conduire à enchaîner goulûment le reste de la série avec une insatiable envie de connaître la suite. Le prix de la collection dépendra évidemment de la longueur de l’aventure.
Rappel des œuvres déjà chroniquées par ici:
Lone Wolf & Cub (Kazuo Koike & Goseki Kojima/Panini Manga/32 euros par tome/12 tomes): chef d’œuvre enfin réédité dans son intégralité, qui met en scène un samouraï hors-la-loi et son fils qui enchaîne les missions d’assassinat. C'est beau, c’est culte, c’est cher mais l’édition est belle et vous promet plus de 600 pages par tome
Dead Dead Demon’s DedededeDestruction (Inio Asano/Kana/8 euros par tome/12 tomes): deux lycéennes vivent leur vie et leurs amours avec leur bande de copines alors qu’un vaisseau alien gigantesque surplombe la ville de Tokyo sans que la population sache s’il est hostile ou non. Une curiosité SF à ne pas manquer
The Nice House on the Lake (James Tynion IV & Alvaro Martinez/Urban/20 euros par tome/2 tomes): une galerie de personnages est réunie mystérieusement dans une superbe villa par un ami commun, et c’est comme ça que le cauchemar commence. Pas du gore à proprement parler mais une histoire horrifique bien plus psychologique qu’il n’y paraît, et sacrément prenante.
Deadly Class (Rick Remender & Wes Craig/Urban Comics/18 euros par tome/12 tomes): un gamin va intégrer une école d’assassins, où chacun ne recule devant rien pour supplanter les autres. Une histoire bien plus ambitieuse que son pitch le laisse penser, préférant sonder la psychologie de jeunes gens perdus sans omettre de grands moments d’actions. Incontournable
Venus Wars (Yoshikazu Yasuhiko/Naban editions/25 euros par tome/2 tomes): sur Venus, deux nations s’affrontent pour la conquête de la planète. Véritable monument des années 90, on a enfin droit à une réédition digne de ce nom.
[#manga] - Sidooh
1858, Japon. Tandis que les occidentaux ouvre le pays au monde extérieur, une vague de choléra décime bon nombre d’habitants. Shotaro et Gentaro sont deux frères qui voient leur mère succomber à la maladie, et ils vont devoir respecter ce qu’elle leur a inculqué: seuls les plus fort s’en sortent. Encore adolescents, ils vont vite apprendre à se battre pour survivre, au milieu d’un Japon en plein changement politique et sociétal, correspondant à la fin de l’ère Edo et le début de l’ère Meiji.
Grande saga qui totalise 25 tomes, Sidooh a eu la change d’être édité entièrement par Panini Manga, après une première tentative stoppée il y a quelques années. Une oeuvre fleuve de Tsutomu Takahashi, mangaka que l’on oublie souvent mais qui possède pourtant une patte singulière et un travail artistique dense et riche, notamment sur Bakuon Retto. Pour Sidooh, il tente de mélanger la fiction à la réalité, afin de placer ses personnages dans la grande histoire du Japon féodal, relatant la guerre de Boshin ou la participation du célèbre Shinsengumi. Evidemment, on est plus dans le sensationnel et l’émotion que dans l’histoire purement factuelle, puisque Sidooh reste une aventure remplie de guerriers et de samouraïs, parvenant à faire évoluer ces deux frères sur plusieurs années afin de montrer leur transformation dans un pays en pleine crise. Une grande fresque qu’il serait dommage de louper.
Sidooh / Tsutomu Takahashi / Panini Manga / 8.30 euros / 25 tomes
[#manga] - Mauvaise herbe
Alors qu’une descente de police a lieu dans une maison close clandestine, le lieutenant Yamada tombe sur la jeune Shiori, lycéenne qui a fugué de sa maison à cause de sa mère violente. Ressemblant à la fille qu’il a perdu, Yamada laisse la police la raccompagner chez elle mais Shiori fuit à nouveau, préférant aller chez un inconnu rencontré sur le net. Yamada part alors à sa recherche pour lui éviter des ennuis et tenter de comprendre sa détresse.
Œuvre complète en 4 tomes de Keigo Shinzô, dont on a déjà parlé pour le fabuleux Hirayasumi, le mangaka part cette fois-ci sur une histoire bien plus sombre qu’à l’accoutumée. On le sait quand on a lu certaines de ses œuvres, la légèreté qui pointe dans ses histoires n’est là que pour camoufler quelque chose de plus grave et sérieux, comme une carapace pour se protéger et ne pas faire de vagues. Dans Mauvaise Herbe, l’auteur ne prend pas de gants et ce, dès le début. L’histoire est difficile et confronte un père en deuil souffrant de sa propre culpabilité et une fille qui pense que l’affection ne passe uniquement que par les désirs malsains d’hommes profitant de la situation. Deux personnages brisés qui vont peu à peu se reconstruire, malgré une situation impossible. Un petit bijou de sensibilité.
Mauvaise herbe / Keigo Shinzô / Le Lézard noir / 13 euros / 4 tomes
[#bd] - Midnight Tales / Order
Conçu comme une anthologie de plusieurs histoires développé par Mathieu Bablet (Carbone & Silicium), les Midnight Tales racontent les aventures d’une organisation de sorcières, l’Ordre de Minuit, qui lutte à travers le monde et les âges contre des démons ou des phénomènes paranormaux. The Midnight Order, quant à lui, est un album plus grand qui reprend un petit fil rouge installé dans Midnight Tales et qui conclut l’univers imaginé par l’auteur, mais toujours porté par plusieurs auteurs du label 619.
Tout comme Doggy Bags en son temps et Lowreader récemment, le label 619 aime proposer des formats anthologiques, souvent porté par Run, un des fondateurs et auteur de Mutafukaz. Pour Midnight Tales, c’est Mathieu Bablet qui chapeaute le tout, voulant retranscrire cette ambiance d’ésotérisme et d’urban fantasy tel que l’on peut le voir dans des romans fantastiques. La particularité est d’avoir un petit fil rouge qui s’installe, mais les scénarios peuvent tout à fait se lire dans l’ordre que l’on veut, chaque histoire est indépendante et offre l’opportunité à plein d’artistes (Guillaume Singelin, Sourya…) de mettre en avant leur proposition et de s’amuser avec l’univers. Une curiosité pour les amateurs de fantastique.
Midnight Tales - The Midnight Order / Mathieu Bablet & divers artistes / Ankama - Rue de sèvres / 14 euros (Tales) - 25 euros (Order) / 4 tomes + 1 tome
[#bd] - Saint-Elme
Franck Sagaré est un détective privé qui débarque avec son assistante, madame Dombre, à Saint-Elme, une étrange ville en pleine montagne qui a gagné une certaine réputation grâce à son eau de source. Franck recherche un jeune fugueur qu’il soupçonne d’avoir atterri ici en se laissant embarquer dans des affaires plutôt louches. Il va découvrir qu’entre une riche famille aux relations complexes, un trafic plus que douteux et des événements étranges, il n’est pas au bout de ses surprises.
Fin de parcours pour l’aventure Saint-Elme par Serge Lehman au scénario et Frederik Peeters aux dessins. Les deux avaient déjà bossé ensemble sur L’Homme Gribouillé mais ils reviennent pour ce polar noir aux couleurs flashy qui surprennent, mélangeant le policier avec une touche de Twin Peaks. Chaque personnage n’a pas forcément un bon fond et se retrouve dans cette ville pour des raisons bien particulières, et on prend un vrai plaisir à suivre ce thriller mené de main de maître, avec le trait si particulier de Peeters qui oscille entre le réalisme de son trait et des couleurs tranchés qui donne à la BD une vraie patte marquante. A noter qu’une intégrale en noir et blanc vient de sortir en cette fin d’année.
Saint-Elme / Serge Lehman & Frederik Peeters / Delcourt / 17 euros / 5 tomes - 1 intégrale N&B
[#manga] - Les enfants de la mer
Ruka est une collégienne habitant dans une ville portuaire, qui n’est pas réputée pour se faire beaucoup d’amis et préfère se rebeller contre le système plutôt que de suivre les consignes. Elle finit par se promener au bord de la mer et tombe sur deux jeunes enfants, Umi et Sora, dont on dit qu’ils ont été élevés par des dugongs. Une histoire qui attire la curiosité de Ruka et qui va essayer d’en apprendre plus sur ces “enfants de la mer”.
J’avais déjà parlé du mangaka Daisuke Igarashi pour Petite Forêt, et Les Enfants de la Mer est peut-être l’une de ses œuvres les plus importantes. Le manga a été adapté en film d’animation: même si c’est artistiquement sublime, l’adaptation n’arrive pas à capter la densité de l’univers dépeint dans ces cinq tomes, qui plonge le lecteur dans une véritable fascination pour le monde marin. Une exploration sensorielle vraiment réussie qui lorgne au fil de l’histoire vers du fantastique, dans sa façon de confronter le monde mystérieux des océans avec celui des humains. Les dessins de Igarashi ne ressemblent à rien de ce que l’on connaît des mangas habituels mais il capte parfaitement la faune et la flore marine avec une précision redoutable, donnant l’impression de se balader dans un carnet de croquis vivant.
Les enfants de la mer / Daisuke Igarashi / Tonkam / 16 euros / 5 tomes
Ça me fait penser qu'il faut que je me lance dans Lone Wolf & Cub un jour !
Très belle sélection !